Le régime enregistré d’épargne-invalidité (REEI) peut changer la vie s’il est utilisé à bon escient. Toutefois, ce nouveau produit spécialisé est complexe. Trop souvent, les titulaires d’un REEI et les conseillers ne l’utilisent pas correctement, ce qui fausse les projections financières et fait en sorte qu’ils laissent passer des occasions.
Je décris le REEI aux autres conseillers comme un mélange d’un régime enregistré d’épargne-études (REEE) et d’un régime enregistré d’épargne-retraite (REER) ou d’un fonds enregistré de revenu de retraite (FERR) offert uniquement aux bénéficiaires admissibles au crédit d’impôt pour personnes handicapées (CIPH).
Lorsque le bénéficiaire est jeune, le REEI s’apparente au REEE, puisque des bons et des subventions de contrepartie y seront versés. Comme pour le REEE, toute somme retirée comprend une portion imposable et une portion non imposable. Un peu comme un REER ou un FERR, plus tard dans la vie, le REEI vise à assurer un revenu de retraite régulier à un bénéficiaire handicapé. Il ressemble à ces deux régimes en sa qualité d’abri fiscal.
En parlant avec des clients et des collègues, je me suis rendu compte que beaucoup d’attention est donnée à l’étape de l’accumulation, mais que l’étape des retraits en reçoit très peu, ce qui peut poser problème.
J’aborderai ici les deux étapes pour mettre en lumière les points mal compris et les occasions ratées par les clients et les collègues.
La subvention de contrepartie versée par le gouvernement est la caractéristique vedette du REEI. Bien que cette subvention varie selon le revenu et les cotisations totales, les fonds versés peuvent s’élever à trois fois le montant cotisé (pour une cotisation de 500 $, le montant de la subvention peut atteindre 1 500 $) si le revenu familial du bénéficiaire est inférieur à 100 392 $ en 2023. Même si la subvention ne peut pas dépasser 70 000 $ pendant toute la durée du régime du bénéficiaire, c’est une grosse contribution du gouvernement!
Le soutien ne se limite pas à la subvention, puisque les bénéficiaires dont le revenu est inférieur à 32 797 $ en 2023 peuvent également recevoir 1 000 $ par année sous forme de Bon canadien pour l’épargne-invalidité. Aucune cotisation n’est requise : il suffit d’avoir un REEI. La limite cumulative en bons est de 20 000 $.
Un bénéficiaire dont les revenus sont perpétuellement faibles pourrait recevoir 90 000 $ en subventions et en bons tout en cotisant seulement 30 000 $ à son REEI sur une période de vingt ans.
Ces cotisations prennent alors souvent la forme de cadeaux d’un parent, d’un grand-parent ou d’un tuteur. Un REEI dans lequel le cotisant a versé les fonds minimums est un excellent départ, mais il pourrait être judicieux d’y verser des fonds au-delà du montant minimal pour obtenir des subventions.
Régime d’épargne à impôt différé
Comme dans un REEE et un REER, les revenus des placements sont exempts d’impôt tant qu’ils fructifient dans le REEI. L’impôt est reporté jusqu’à ce que des montants soient retirés du REEI, à l’instar d’un REEE ou d’un REER.
Bien que l’effet ne soit pas immédiat comme c’est le cas pour les subventions et les bons, des placements judicieux dans un REEI feront en sorte que le résultat de la croissance cumulative des investissements constituera la plus grande part du solde à la retraite :
Fractionnement du revenu
Bien que le REEI soit destiné à son bénéficiaire, c’est rarement ce dernier qui y verse les cotisations. La portion imposable des retraits est imposable pour le bénéficiaire, peu importe la source de la cotisation au REEI.
Supposons que des grands-parents aisés participent au REEI au nom de leur petit-enfant handicapé. Comme le revenu des grands-parents se situe dans une tranche d’imposition élevée et celui du bénéficiaire se situe dans une tranche moins élevée, la participation au REEI peut être, pour les deux parties, un moyen de réduire l’impôt payé durant toute leur vie. En transférant des fonds d’un compte de placement imposable vers un REEI, les grands-parents transfèrent des sommes qui seraient imposées annuellement à des taux d’imposition élevés vers un régime à impôt différé dont les sommes seront éventuellement imposées à des taux moins élevés.
Bien entendu, il s’agit également d’un changement de propriété et de contrôle. En plus de vouloir les avantages fiscaux associés à cette stratégie, le cotisant doit aussi avoir l’intention de donner les sommes au bénéficiaire.
Évaluation des actifs
Les prestations d’invalidité provinciales peuvent constituer une grande partie du revenu d’une personne handicapée. Pour déterminer les prestations auxquelles le bénéficiaire a droit, une évaluation des actifs est réalisée. Cette dernière se penche sur le total des actifs détenus par le bénéficiaire. S’ils dépassent un certain seuil, cela peut entraîner une réduction du montant des prestations. L’épargne peut donc avoir des revers pour le bénéficiaire!
Le REEI est exclu de l’évaluation des actifs dans toutes les provinces et dans tous les territoires. Il est ainsi possible de maximiser les prestations en transférant des fonds d’un compte non exempté à un REEI. Dans certaines provinces, les sommes retirées d’un REEI sont également exemptées, mais cela demande une trace documentaire claire.
Quoi qu’il en soit, le transfert de fonds additionnels appartenant au bénéficiaire à un REEI présente non seulement des avantages comme une croissance avec impôt différé et des subventions de contrepartie, mais il permet potentiellement de maximiser les autres prestations.
Mais attention! Le REEI est un régime à impôt différé qui ne bénéficie pas d’un traitement fiscal préférentiel
Avant que tout le monde se précipite pour verser des fonds additionnels dans un REEI, sachez que les choses deviennent plus compliquées lorsque le taux d’imposition actuel ne connaît pas de diminution nette dans l’avenir. Il est possible que le bénéficiaire ait un revenu élevé aujourd’hui et au moment de commencer les retraits puisque l’admissibilité au crédit d’impôt pour personnes handicapées n’est pas liée à la capacité de travailler (contrairement à l’assurance invalidité), mais à l’admissibilité à un crédit d’impôt.
Le REEI permet de reporter l’impôt, mais une fois que des sommes sont retirées, le capital est imposé comme revenu, et ce, peu importe s’il s’agit de gains en capital, de dividendes ou d’intérêts. Au Canada, les gains en capital et les dividendes bénéficient d’un traitement fiscal plus avantageux que les autres types de revenus. Il faut alors se demander s’il vaut mieux payer de l’impôt à un taux préférentiel chaque année ou au taux normal d’imposition plus tard.
Cette analyse n’est pas si simple, puisqu’elle repose sur trois variables :
Chez PWL, nous avons programmé une calculatrice pour comparer les variables et intégrer les résultats dans nos recommandations lors de la planification de là où investir le prochain dollar pour un client dans cette situation.
Planification des retraits : méthode du dernier entré, premier sorti et remboursements
Imaginez que vous remplissez un réfrigérateur de cannettes de boisson gazeuse. Vous commencez par le fond et vous continuez jusqu’à ce qu’il soit rempli à l’avant. Lorsque vous prenez votre première cannette, vous la prenez à l’avant. La dernière placée est donc la première sortie. En comptabilité, on parle de la méthode du dernier entré, premier sorti (DEPS).
Les cotisations au REEI sont traitées de la même façon : les derniers fonds déposés pour lesquels une subvention sera versée sont les premiers fonds qui seront retirés. Il est important de comprendre ce principe pour éviter d’avoir à rembourser l’une des subventions versées dans le REEI.
Il faut dix ans avant que les subventions versées dans le REEI soient « acquises[J.1] ». Si vous faites un dépôt, recevez une subvention et faites un retrait avant la fin de la période de dix ans suivant le dépôt, vous devrez rembourser la subvention. Si vous avez fait deux dépôts égaux, il y a onze ans et neuf ans, et que vous retirez la totalité du montant, vous n’aurez qu’à rembourser le montant de la subvention lié à la cotisation la plus récente puisque l’autre subvention aura été pleinement acquise.
Cela peut porter à confusion puisque le compte affiche le solde total du REEI, y compris les subventions, qu’elles soient acquises ou non. Il est important de noter que les subventions n’appartiennent au bénéficiaire qu’après la période de dix ans dans le REEI. C’est pourquoi il est possible de cotiser au REEI jusqu’à 49 ans et de planifier les retraits après 59 ans, soit dix ans plus tard.
Vers la fin : paiements viagers pour invalidité, paiement d’aide à l’invalidité et régime obtenant principalement l’aide du gouvernement
À partir de 60 ans, le bénéficiaire doit commencer à recevoir les paiements viagers pour invalidité (PVI). Ces paiements sont comme une version hybride du versement des fonds de revenu de retraite et des retraits du REEE. Comme pour les fonds de revenu de retraite, le bénéficiaire doit retirer un pourcentage croissant du REEI, selon son âge. Comme pour le REEE, les sommes retirées seront constituées de cotisations (montants non imposables), de subventions, de bons, des montants de roulement et d’intérêts (montants imposables).
Il existe un autre moyen de retirer des fonds d’un REEI : le paiement d’aide à l’invalidité (PAI). Un PAI est un paiement discrétionnaire et souple qui peut être demandé à tout moment. Il s’agit d’une caractéristique très intéressante qui me mène à aborder un autre avantage de verser des cotisations additionnelles, sans contrepartie, à un REEI. Toutefois, les règles relatives au PAI diffèrent selon la source des cotisations au REEI. Si les subventions et les bons du gouvernement dépassent le montant total des cotisations versées au REEI, ce dernier est alors considéré comme un régime obtenant principalement l’aide du gouvernement (RPAG).
Subventions + Bons > Cotisations = RPAG
Le montant forfaitaire maximum, soit le PAI maximal, qu’un bénéficiaire peut retirer d’un RPAG est plafonné à 10 % du solde du compte au début de l’année ou au montant des PVI annuels, selon le montant le plus élevé. L’inconvénient, c’est que le bénéficiaire peut voir les fonds dont il a besoin dans son compte, mais ne pas y avoir accès pour couvrir ses dépenses importantes!
Si le total des cotisations privées est plus élevé que le total des cotisations du gouvernement, le REEI sera considéré comme un régime non RPAG. Si le régime est non RPAG, le bénéficiaire peut alors demander un PAI, sans montant maximum. Il n’est pas conseillé de vider un compte entier dès le jour 1 puisque les retraits sont tout de même assujettis à l’augmentation des taux d’imposition sur le revenu des particuliers. Toutefois, la possibilité de retirer le montant désiré lorsque le bénéficiaire en a besoin est un avantage supplémentaire. Cela peut inciter à cotiser au REEI au-delà de ce qui est nécessaire afin de bénéficier d’un maximum de subventions et de croissance.
Conclusion
Beaucoup d’investisseurs ont tendance à se concentrer sur l’étape de l’accumulation dans un REEI, sans se doter d’un plan clair pour les retraits. Si les ressources sont disponibles, des fonds additionnels peuvent rendre le compte plus important, grâce à la croissance avec impôt différé, à de plus grandes prestations d’invalidité provinciales et à des retraits souples pendant la retraite en évitant que le régime devienne un RPAG. Il est important de peser ces avantages en tenant compte de la hausse potentielle des taux d’imposition sur les revenus de placement et de la période de dix ans pour acquérir les subventions versées au REEI.
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Source d’information : Guide de l’utilisateur à l’intention des fournisseurs de Régime enregistré d’épargne-invalidité – Canada.ca