Les fonds de couverture offrent aux investisseurs une alternative aux actions et aux obligations. Ils promettent généralement des rendements absolus élevés, un risque limité et/ou des rendements non corrélés aux classes d’actifs traditionnelles. On les appelle fonds « de couverture » parce que la plupart des risques du fonds qui ne sont pas liés à l’opinion du gestionnaire sont généralement couverts, dans le but de produire des rendements absolus positifs dans toutes les conditions de marché. Les fonds de couverture peuvent être considérés comme la version la plus extrême de la gestion active : en principe, leur rendement est entièrement déterminé par les compétences du gestionnaire plutôt que par la performance générale du marché. Mais dans la vie réelle, les rendements de nombreux fonds de couverture sont fortement corrélés aux actions. Par exemple, un article récent a estimé la corrélation entre l’indice composite pondéré HFR et l’indice S&P 500 à 0,89 de 2010 à 2020.
Fin 2019, les fonds de couverture géraient collectivement des actifs d’une valeur de 6 000 milliards de dollars (11 000 milliards de dollars en incluant le capital et les emprunts). C’est beaucoup, mais dans un sens, c’est aussi un montant modeste par rapport à la valeur des fonds communs de placement de 69 000 milliards de dollars dans le monde. Selon le magazine Forbes, les trois organisations de fonds de couverture qui gèrent le plus d’actifs sont Bridgewater Associates (124 milliards de dollars), Renaissance Technologies (106 milliards de dollars) et AQR Capital Management (95 milliards de dollars).
Seule la moitié de l’univers des fonds de couverture est documentée par des bases de données commerciales, tandis que les données de performance sur l’autre moitié sont difficiles à obtenir, car la publication des résultats via des bases de données est facultative. Contrairement à l’opinion courante, les fonds de couverture qui ne publient pas leurs résultats ont tendance à surperformer ceux qui le font. Une explication possible de cette surperformance pourrait être que les fonds de couverture compétents n’ont pas besoin de faire de publicité : les investisseurs avertis savent qui ils sont.
Contrairement aux fonds communs de placement, les fonds de couverture sont peu réglementés et opaques. Les gestionnaires ne sont pas tenus de fournir autant d’informations sur les opérations et les stratégies du fonds que les fonds communs de placement. Les gestionnaires font souvent valoir que divulguer trop d’informations sur leurs activités nuirait à leur avantage concurrentiel.
Grâce à la structure de société en commandite qu’ils choisissent fréquemment, les fonds de couverture ne paient pas d’impôts sur les revenus d’investissement au niveau du fonds. Les revenus sont répercutés sur les investisseurs particuliers qui paient l’impôt sur le revenu.
Les investisseurs avisés seront attentifs aux clauses contractuelles : 1/3 des fonds de couverture limitent les retraits de capitaux par une période de blocage initiale, qui peut aller jusqu’à trois ans. D’autres restrictions incluent un calendrier de rachat fixe (mensuel, trimestriel, semestriel ou annuel) et une exigence de délai de préavis (généralement de 30 à 60 jours) pour exercer le droit de rachat. Les clauses de blocage n’ont pas que des inconvénients, car elles réduisent le risque de financement. Certaines recherches ont montré que les fonds de couverture présentant un risque de financement plus faible génèrent des rendements plus élevés, grâce à une exposition accrue aux anomalies de valorisation des actions.
Beaucoup considèrent que les fonds de couverture sont plus risqués que les fonds d’actions et d’obligations classiques. Ils ont en effet recours à des techniques complexes, telles que la vente à découvert, les produits dérivés et des stratégies à effet de levier, pour se différencier des gestionnaires d’actifs traditionnels. Alors qu’une position longue sur un actif peut, au pire, entraîner une perte de 100 %, les ventes à découvert ont un potentiel de perte infini. Cependant, les ventes à découvert peuvent également « couvrir » ou réduire le risque lorsqu’elles sont jumelées à des positions longues hautement corrélées. On peut en dire autant des produits dérivés et de l’effet de levier : ils peuvent positionner le portefeuille de manière à amplifier ou atténuer les gains et les pertes potentiels.
En raison de leur risque plus élevé, de leurs stratégies complexes, de leur opacité et de leurs restrictions de capital, les fonds de couverture sont principalement proposés aux investisseurs institutionnels et individuels accrédités.
Les systèmes de rémunération des fonds de couverture sont souvent coûteux, combinant des frais de base et des honoraires à la performance. La structure de rémunération varie d’un fonds à l’autre. Elle est généralement asymétrique : si le gestionnaire de fonds ajoute de la valeur au-delà d’un minimum requis, il recevra un revenu supplémentaire, mais s’il perd de l’argent, le gestionnaire ne dédommagera pas les clients. Cependant, la raison d’être des honoraires à la performance est d’inciter les gestionnaires à donner le meilleur d’eux-mêmes. La rémunération des fonds de couverture sera abordée plus en détail dans un prochain article.
Si leur structure de rémunération asymétrique peut inciter les gestionnaires de fonds de couverture à prendre des risques excessifs, ces derniers co-investissent parfois dans leurs fonds pour atténuer les conflits d’intérêts. Néanmoins, les observateurs affirment que plusieurs fonds de couverture adoptent des stratégies d’investissement à biais négatif, parfois comparées à des opérations de ramassage de pièces de dix sous devant un rouleau compresseur, réalisant des profits modestes la plupart du temps (et générant des honoraires à la performance) jusqu’à ce qu’un événement rare déclenche des pertes importantes.
Un exemple bien connu de stratégie d’investissement biaisée qui a mal tourné est l’effondrement en 2007 de deux fonds de couverture à revenu fixe gérés par la banque d’investissement Bear Stearns, prélude à la disparition de l’ensemble de la banque l’année suivante. Les rendements ajustés au risque (ou ratios de Sharpe) trop beaux pour être vrais sont parfois perçus par les investisseurs avisés comme un mauvais présage.
Il existe trois grands types de fonds de couverture : les fonds à stratégie unique, les fonds multi-stratégies et les fonds de fonds. La distinction entre un fonds multi-stratégies et un fonds de fonds est essentielle pour deux raisons. Tout d’abord, contrairement aux fonds multi-stratégies, les fonds de fonds facturent plusieurs niveaux de frais. Ensuite, les fonds multi-stratégies facturent des honoraires à la performance sur le résultat global du portefeuille. En comparaison, les fonds de fonds facturent des honoraires à la performance sur leurs fonds individuels sous-jacents, ce qui peut être beaucoup plus coûteux. Dans un prochain article, nous aborderons les dommages collatéraux des frais de performance lors de la détention d’un portefeuille diversifié de fonds de couverture. En attendant, retenez que les fonds multi-stratégies ont tendance à être moins chers que les fonds de fonds.
En résumé, les investisseurs en fonds de couverture doivent comprendre les mécanismes de chaque produit et analyser avec soin les détails contractuels d’un fonds avant d’investir. Les informations sur le type de fonds, la structure de rémunération, le co-investissement du gestionnaire et la volonté de la direction de partager régulièrement des informations avec les investisseurs doivent être évaluées. Et, bien sûr, les investisseurs doivent choisir des stratégies de fonds de couverture compatibles avec leurs objectifs. Par exemple, un investisseur qui cherche principalement à se diversifier en s’éloignant des actions et des obligations évitera les stratégies à bêta élevé.
Il existe des dizaines de stratégies de fonds de couverture. Notre prochain article vous en dira plus sur sept d’entre elles. Nous n’aborderons pas toutes les stratégies possibles, mais nous vous donnerons un échantillon des trois principaux types : les stratégies de valeur relative, les stratégies axées sur les événements et les stratégies directionnelles.