Sep 11, 2019

Comparer les FNB aux CDO, c’est faire fausse route!

Selon cet article de Bloomberg, Michael Burry (gestionnaire de fonds de couverture et personnage principal du roman et du film The Big Short, ou Infaillible) établit un parallèle entre les titres garantis par des créances (TGC, ou CDOs en anglais), dont les désastreuses imperfections ont été en partie responsables de la crise financière de 2008, et les fonds négociés en bourse (FNB), et conclut qu’un dénouement analogue est susceptible de se produire dans ce marché aussi. Pour être en mesure de se prononcer sur le sujet, il faut d’abord comprendre les TGC et les FNB.

 

Qu’est-ce qu’un TGC?

Un TGC est une obligation créée par le regroupement de placements porteurs d’intérêts et dont les flux de trésorerie sont redistribués. Ses actifs sous-jacents peuvent être des obligations d’entreprise cotées en bourse ou des prêts privés, tels que les prêts hypothécaires résidentiels. Les actifs sont regroupés dans une entité ad hoc, c’est-à-dire une structure juridique créée exclusivement dans le but de les détenir et de redistribuer les flux de trésorerie aux détenteurs de TGC. Voici un exemple de redistribution des flux de trésorerie : supposons qu’un TGC comprenne trois catégories de titres, soit les catégories A, B et C. Lorsque les actifs sous-jacents arrivent à échéance, les remboursements de capital sont versés aux détenteurs du TGC. Les détenteurs de la catégorie A reçoivent la première tranche de 30 % des remboursements de capital, les détenteurs de la catégorie B reçoivent la tranche de 30 % suivante et, enfin, les détenteurs de la catégorie C reçoivent ce qui reste à la fin (la pleine part de 40 % de la valeur nominale si aucun défaut n’est survenu dans le groupe d’actifs). Comme le groupe d’actifs comporte habituellement des risques (ce qui signifie que des défauts sont raisonnablement susceptibles de se produire), la catégorie A est beaucoup moins risquée et son taux d’intérêt est moins élevé du fait qu’elle est remboursée en premier. La catégorie B est plus risquée que la catégorie A et la catégorie C est, au bout du compte, la plus risquée parce que c’est la dernière à être payée.

 

Qu’est-ce qu’un FNB?

Les principaux FNB, comme Vanguard Total Market (VTI) aux États-Unis ou le fonds BMO S&P/TSX Capped Composite (ZCN) au Canada, sont des groupes d’actions ou d’obligations cotées en bourse qui reproduisent un indice boursier. Les FNB ressemblent beaucoup aux fonds communs de placement, mais présentent deux différences importantes : 1. Les parts de FNB sont négociées directement en bourse. 2. Les parts de FNB sont créées ou rachetées par un participant autorisé (un teneur de marché), tandis que les parts de fonds communs de placement sont créées ou rachetées par une société de fonds commun de placement.

 

Différences entre les FNB et les TGC

Comme les TGC, les FNB versent les flux de trésorerie courants (intérêts et dividendes) des actifs sous-jacents aux détenteurs de parts. Mais contrairement aux TGC, les FNB réinvestissent les remboursements de capital dans le portefeuille : les FNB sont censés être des entreprises en situation de continuité d’exploitation, tandis que les TGC ont une durée de vie limitée. Les FNB, par ailleurs, ne restructurent pas les flux de trésorerie des actifs sous-jacents, ce qui constitue une autre différence majeure : tous les détenteurs d’un FNB sont traités de la même manière. Enfin, les FNB courants n’investissent que dans des actions et des obligations cotées en bourse. Ces actifs sous-jacents sont soumis à des normes de divulgation de l’information rigoureuses et sont relativement liquides, alors que les actifs sous-jacents des TGC peuvent être assez opaques.

 

Pourquoi les TGC ont-ils dérapé en 2008?

Pendant la crise financière, un secteur clé est devenu problématique : les TGC garantis par des prêts hypothécaires résidentiels. Des hypothèques non assurées ont commencé à être intégrées à des structures de TGC et, avec le temps, la qualité des prêts hypothécaires inclus dans ces structures n’a cessé de se dégrader. À tel point que des prêts de très mauvaise qualité, en particulier des prêts NINJA (de l’anglais « No Income and No Job », c’est-à-dire que l’emprunteur n’avait ni revenu ni emploi), ont fini par être intégrés à des groupes de TGC. Les investisseurs étaient rassurés du fait que les agences d’évaluation de crédit attribuaient une cote élevée à la plupart des tranches de TGC vendues sur le marché. Mais ces agences ont terriblement surestimé la qualité d’un grand nombre de ces TGC. Certaines institutions financières ont dû rapatrier les tranches de TGC invendues dans leur bilan. Ces actifs toxiques ont causé tellement de tort à certaines grandes institutions financières aux États-Unis qu’elles ont pratiquement fait faillite et ont dû être renflouées par le gouvernement américain. Sans les fonds publics, elles n’existeraient probablement plus aujourd’hui.

 

Pourquoi il ne faut pas comparer les deux

Les TGC problématiques de 2008 regroupaient des actifs de mauvaise qualité et étaient présentés aux investisseurs comme étant relativement sûrs, affirmation qui était appuyée par les agences d’évaluation de crédit, mal informées. On présumait qu’ils étaient de bonne qualité en s’appuyant sur l’idée que le risque peut être réduit par la diversification des actifs (détenir beaucoup de prêts dans l’entité ad hoc) et par la création de catégories de rang plus élevé (« A » et « B » dans notre exemple). Par comparaison, les FNB sont transparents (les actifs qu’ils détiennent sont publiés fréquemment). Les investisseurs savent ce qu’ils obtiennent lorsqu’ils achètent un FNB connu. Ils peuvent sous-estimer le risque des actions ou des obligations à un certain moment, mais ce n’est pas un défaut du FNB en soi, c’est plutôt une erreur de jugement concernant une catégorie d’actifs. La structure des FNB n’est pas opaque comme celle des TGC. C’est pourquoi il ne faut pas comparer les FNB aux TGC.

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